(à l'exclusion du nouveau-né et du
réveil d'anesthésie)
XXIème conférence de
consensus de la SRLF - Texte long
Jeudi
11 octobre 2001
Ecole Normale Supérieure
16, allée d'Italie 69007 LYON
Président : C.
Richard (Le Kremlin-Bicêtre)
L. Beydon (Angers), S. Cantagrel (Tours), A. Cuvelier (Rouen), B. Fauroux
(Paris), B. Garo (Brest), L. Holzapfel (Boug en Bresse), O. Lesieur (La
Rochelle), J. Levraut (Nice), E. Maury (Paris), C. Polet (Rouen), N. Roche
(Paris), J. Roeseler (Bruxelles).
Conseillers scientifiques : C.
Chopin (Lille), T. Similowski (Lyon).
Recherche bibliographique : O.
Marain (Lyon)
Organisateur local : D.
Robert (Lyon)
Commission des référentiels
coordonnée par P. Charbonneau (Caen) :
J.L. Diehl (Paris), B. Garrigues
(Aix-en-Provence), B. Guidet (Paris), O. Jonquet (Montpellier), P. Jouvet
(Paris), F. Joye (Carcassonne), D. Robert (Lyon), R. Robert (Poitiers), U.
Siméoni (Strasbourg), B. Vallet (Lille).
Cette conférence est organisée
avec l'aide des laboratoires Aventis, Bayer-Pharma, Bristol-Myers Squibb,
Chiesi SA, Fresenius France Phama, GSK, LFB, Pfizer, Roche, Tyco Health Care et
Wyeth Lederlé
La Société de réanimation de
langue française remercie vivement la Société Générale pour son aide généreuse.
AI = Aide inspiratoire
BPCO = Bronchopneumopathie chronique obstructive
CPT = Capacité pulmonaire totale
CRF = Capacité résiduelle fonctionnelle
CV = Capacité vitale
DPT = Distension pulmonaire dynamique
FC = Fréquence cardiaque
FiO2 = Fraction inspirée en oxygène
FR = Fréquence respiratoire
FR/VT = Fréquence respiratoire sur volume courant
HTAP = Hypertension artérielle pulmonaire
IRA = Insuffisance respiratoire aiguë
ITT = Index temps-tension du diaphragme
P0,1 = Pression d'occlusion des voies aériennes
PA (S,D) = Pression artérielle (systolique, diastolique)
PaCO2 = Pression partielle artérielle en gaz carbonique
PaO2 = Pression partielle artérielle en oxygène
Pdi = Pression transdiaphragmatique
Pdi max = Pression transdiaphragmatique maximale
Pe max = Pression expiratoire statique maximale
PEP = Pression téléexpiratoire positive
Pi max = Pression inspiratoire statique maximale
PTP = Produit temps pression
RL = Respiration libre
SaO2 (SpO2) = Saturation artérielle (pulpaire) en oxygène
SAS = Syndrome d'apnée du sommeil
SDRA = Syndrome de détresse respiratoire aigu de l'adulte
Te = Temps expiratoire
Ti = Temps inspiratoire
Ttdi = Index temps-tension du diaphragme
VACI = Ventilation assistée contrôlée intermittente
VD/VT = Espace mort
VM = Ventilation mécanique
VMM = Ventilation maximale minute
VNI = Ventilation non invasive
VS = Ventilation spontanée
VT ou VT = Volume courant
De nombreux
patients admis en réanimation nécessitent le recours à la ventilation mécanique
(VM). Celle-ci est associée à la survenue de complications dont l'incidence est
d'autant plus grande que la durée de l'intubation est plus longue. Souvent la
VM est inutilement prolongée comme en atteste le faible pourcentage de
réintubations des patients extubés de manière non programmée et l'impact
favorable de la mise en place d'un protocole de sevrage. À l'inverse, l'échec
d'une extubation programmée est responsable d'une augmentation de morbidité et
de mortalité.
L'établissement
d'un consensus à propos du sevrage de la VM est donc justifié par la nécessité
d'appliquer au patient une procédure dont l'objectif sera de réduire la durée
de la VM tout en tolérant un certain pourcentage d'échecs. Cette procédure
comporte trois étapes (figure 1) :
La
définition retenue par le jury pour le terme « sevrage », est la procédure
décrite ci-dessus aboutissant à l'interruption de la VM pendant 48 heures. Ce
sevrage réussi s'accompagne habituellement de l'extubation.
Les cinq
questions posées au jury étaient les suivantes :
L'ensemble
des recommandations formulées par le jury et le niveau de preuves sur
lesquelles elles s'appuient ont été classés en fonction des règles suivantes :
Society of Critical Care Medicine Rating System for Strength of Recommendation
and Quality of Evidence Supporting the References, 1997.
Le score
d'évaluation des références était le suivant :
Le score
pour les recommandations se composait de trois niveaux :
Ces scores
sont indiqués entre crochets dans le texte.
L'opportunité
d'interrompre la VM doit être recherchée dès son instauration, indépendamment
de la pathologie sous-jacente [2]. La procédure de sevrage débute par la
recherche du pré-requis à l'épreuve de VS. Ce pré-requis comporte des critères
généraux et des critères respiratoires. Leur recherche, effectuée en règle
générale par le personnel infirmier et/ou les kinésithérapeutes, doit être
précoce [c, 3], quotidienne [c, 3] et faire l'objet d'un protocole rédigé [a,
1].
Les
critères généraux énoncés dans la littérature relèvent du bon sens clinique [c,
3] mais n'ont pas fait l'objet de travaux spécifiques. Les critères généraux
retenus par le jury sont : l'absence de vasopresseur et d'inotrope, l'absence
de sédation et une réponse cohérente aux ordres simples [3].
Les
critères respiratoires retenus pour prendre la décision de pratiquer une épreuve
de VS sont une valeur de FiO2 ¾ 50 % et un niveau de PEP ¾ 5 cmH2O [c, 3].
Le médecin
peut s'affranchir d'un ou plusieurs de ces critères généraux ou respiratoires
pour décider de l'épreuve de VS [3].
Les
paramètres de mécanique ventilatoire et les indices qui en dérivent (pressions,
résistance, compliance, commande ventilatoire) ne sont pas suffisamment
discriminants pour en recommander l'usage systématique [c, 3]. Le sevrage est
réussi dès la première tentative chez les deux tiers environ des patients
sélectionnés sur ces critères [b]. Le taux d'échec qui en découle est considéré
comme acceptable en regard des risques d'une VM prolongée inutilement [3].
Le sevrage
de laVM est le plus souvent facile puisque les deux tiers des malades sont
définitivement sevrés à l'issue de la première épreuve de VS [a]. À l'inverse,
le sevrage difficile est défini soit par l'échec de la première épreuve de VS,
soit par la nécessité d'une reprise d'une assistance ventilatoire dans les 48
heures suivant son arrêt programmé [3]. La difficulté de sevrage lors de la
première épreuve de VS concerne en moyenne un quart des patients [b]. Dans les
48 heures, environ 15 % des patients extubés à l'issue de la première épreuve
de VS sont ré-intubés [b]. Individualiser les patients à risque de sevrage
difficile est important car la ré-intubation est associée de manière
indépendante à une augmentation de la mortalité [b, 2].
Les
critères prédictifs d'un sevrage difficile sont distincts de ceux de l'échec du
retrait de la prothèse endotrachéale [2]. L'évaluation du risque de sevrage
difficile repose sur des facteurs généraux et respiratoires.
La durée
de VM précédant le sevrage ainsi qu'un score de gravité élevé sont décrits
comme des facteurs indépendants du risque de sevrage difficile [b]. L'existence
d'une BPCO [b] ou d'une maladie neuromusculaire [c] responsable de la
décompensation respiratoire initiale multiplie au moins par deux le risque de
sevrage difficile. La présence d'une insuffisance cardiaque gauche ainsi qu'une
coronaropathie pourraient constituer un facteur de risque supplémentaire [c].
L'anxiété du patient ou un environnement psychologique défavorable représentent
probablement des facteurs de risque de sevrage difficile [c]. À l'inverse, les
âges extrêmes ne sont pas retenus comme un facteur de risque indépendant [b].
De
nombreux indices respiratoires ont été étudiés. L'indice le plus souvent
proposé est le rapport fréquence respiratoire sur volume courant (f/VT).
L'existence d'un f/VT „ 105, mesuré deux minutes après la mise en VS sur tube
en T, permettrait de détecter précocement les patients qui ne vont pas
supporter l'épreuve de VS [b, 2]. Son intérêt est discutable tant au plan
scientifique que pratique. Sa valeur discriminante varie selon les études qui
ont utilisé ce test de façon non standardisée sur des populations différentes.
Enfin, le calcul de cet indice nécessite l'utilisation d'un spiromètre.
L'ensemble de ces arguments ne permet pas de recommander ce paramètre de façon
habituelle [b, 3]. D'autres indices, basés sur la mesure de pressions,
résistance ou compliance ont été proposés mais ils sont insuffisamment
spécifiques ou sensibles pour être utilisés en routine [b, 3].
Parmi les
facteurs de risque de l'échec de l'extubation, certains sont liés à la
pathologie sous jacente - pathologie neurologique centrale - [b] et d'autres au
terrain - enfant, sexe féminin - [b]. Ces échecs peuvent être secondaires à un
encombrement bronchique ou à un obstacle laryngo-trachéal. La nécessité
d'aspiration trachéale au minimum toutes les deux heures ainsi qu'une toux ne
permettant pas d'expectorer les sécrétions à l'extérieur de la sonde
d'intubation sont associées à une difficulté d'extubation largement accrue [b].
L'existence d'un obstacle laryngo-trachéal peut être mise en évidence par un
test de fuite autour de la sonde d'intubation, ballonnet dégonflé ou par un
test d'obstruction de la sonde d'intubation [c, 3]. Ces techniques ne sont
cependant pas correctement validées dans la littérature. La présence d'un ou
plus de ces facteurs de risque ne doit pas retarder la procédure de sevrage,
mais impose une vigilance accrue si l'extubation est décidée.
La
recherche systématique et quotidienne de critères simples, autorisant la
réalisation de l'épreuve de VS évite la prolongation inutile de la VM. Cette
recherche peut être efficacement réalisée dans le cadre d'un protocole par le
personnel infirmier et/ou les kinésithérapeutes [a, 1]. Cette attitude réduit
l'incidence des conséquences inhérentes à l'utilisation prolongée de la VM :
auto-extubations, trachéotomies, nombre de patients ventilés de façon prolongée
et durée moyenne de séjour en réanimation [a, 1].
L'élaboration
de ce protocole, écrit, s'inspirant de recommandations de la littérature doit
prendre en compte la réflexion de toute l'équipe soignante [3]. Une application
simple et un niveau d'exigence adapté aux possibilités locales sont des
conditions indispensables à son observance. L'adhésion de l'équipe soignante au
protocole implique une diffusion large de ses objectifs, de ses modalités et de
ses résultats à l'occasion de réunions régulières [3].
La
présence de l'ensemble des critères pré-requis à l'épreuve de VS (voir la
question 1) impose la réalisation sans délai, en règle générale par le
personnel infirmier et/ou les kinésithérapeutes, d'une épreuve de VS[2].
Le patient
doit être informé, rassuré et encouragé. Il est installé de façon confortable
en position semi-assise. Une aspiration trachéo-bronchique doit être réalisée
au préalable [3]. Cette épreuve doit reproduire au mieux les conditions dans
lesquelles le patient se trouvera une fois extubé. L'épreuve de VS peut être
menée sur une pièce en T ou en utilisant un faible niveau d'aide inspiratoire
(AI) de l'ordre de 7 cm H2O, le patient restant alors connecté au respirateur
[a, 1]. Dans ce cas, le niveau d'AI est destiné à supprimer la charge de
travail respiratoire essentiellement liée au circuit du respirateur (valves,
tuyaux) et à un degré moindre à la sonde d'intubation.
Si
l'épreuve est effectuée sur pièce en T, l'air administré est humidifié et
enrichi en oxygène ; un dispositif évitant la ré-inspiration de l'air expiré
doit être utilisé.
Si
l'épreuve est effectuée en AI, le ballonnet sera maintenu gonflé. Il n'est pas
recommandé d'adjoindre à ce niveau d'AI, une pression expiratoire positive [3].
L'utilisation d'un filtre échangeur de chaleur et d'humidité accroît l'espace
mort instrumental et nécessite d'augmenter le niveau d'AI [b, 2].
La
modalité utilisant l'AI permet un contrôle plus précis de la fraction inspirée
d'oxygène administrée, une utilisation des alarmes et du système de monitorage
du ventilateur autorisant une surveillance plus étroite du patient.
Les deux
modalités ne semblent pas différentes en terme de pourcentage de patients
tolérant la VS jusqu'au terme de l'épreuve ou restant en VS 48 heures après
l'extubation [a,1]. Les résultats de travaux cliniques suggèrent que certains
patients ne peuvent terminer l'épreuve de VS sur pièce en T à cause d'une
charge résistive trop importante. L'AI doit donc être vraisemblablement
préférée à la pièce en T si la sonde d'intubation n'a pas un diamètre adéquat
ou est à haut risque d'obstruction [3]. Le choix de la modalité de l'épreuve de
VS reste cependant fonction des habitudes de l'unité.
La durée
de l'épreuve de VS est comprise entre 30 et 120 minutes [1], à l'exception des
patients présentant une insuffisance respiratoire restrictive d'origine
neuromusculaire, chez lesquels l'échec de l'épreuve de VS peut se démasquer de
manière retardée ; ce qui impose de la prolonger au-delà de 120 minutes [3].
Chez ces patients une durée d'au moins 12 heures est souvent proposée. [3].
Lorsqu'un sevrage facile est prévisible (voir la question 2), la durée de
l'épreuve de VS peut être raccourcie sur décision médicale ; la durée suggérée
étant alors au minimum de 30 minutes [3].
La
surveillance repose sur l'évaluation de l'état clinique et sur le monitorage
continu de la fréquence respiratoire, de la fréquence cardiaque, de la pression
artérielle et de l'oxymétrie de pouls. L'aspiration régulière prévient
l'apparition d'un encombrement.
L'apparition
de critères de mauvaise tolérance - fréquence respiratoire > 35 cycles/min,
oxymétrie de pouls < 90 %, variation de plus de 20 % de la fréquence
cardiaque ou de la pression artérielle systolique, sueurs, troubles de la
vigilance, agitation - impose de vérifier la perméabilité de la sonde
d'intubation et d'interrompre l'épreuve de VS après avoir prélevé des gaz du
sang artériel [b, 3]. En l'absence de signe de mauvaise tolérance, la pratique
des gaz du sang artériel n'est pas systématique [3].
En cas de
succès de l'épreuve de VS les facteurs de risque d'échec de l'extubation
doivent être recherchés (voir la question 2). En leur absence et après
aspiration gastrique, le patient doit être extubé sur prescription écrite du
médecin [3]. Chez l'adulte, il n'existe pas d'argument justifiant
l'administration d'une corticothérapie pour prévenir l'œdème laryngé [a, 1].
En cas
d'échec de l'épreuve de VS des facteurs susceptibles de l'expliquer doivent
être recherchés et traités : obstruction de la sonde d'intubation et de l'arbre
trachéo-bronchique, insuffisance ventriculaire gauche, ischémie myocardique,
neuromyopathie de réanimation, sepsis, anémie, dysfonction diaphragmatique,
bronchospasme, désordres métaboliques et nutritionnels.
La
ventilation assistée contrôlée intermittente allonge la durée du sevrage et ne
doit pas être proposée dans cette situation [a, 1]. Deux modalités d'assistance
ventilatoire sont donc possibles [b, 2]. La première consiste à placer le
patient en AI en adaptant le niveau d'AI jusqu'à l'obtention d'une fréquence
respiratoire comprise entre 20 et 30 cycles par minute et en réévaluant la
sensibilité du déclenchement inspiratoire, le réglage de la pente du débit
inspiratoire et le cyclage inspiration/expiration. Simultanément à la
décroissance progressive du niveau d'AI, les épreuves quotidiennes de VS doivent
impérativement être poursuivies sous réserve de la persistance des critères
pré-requis pour l'épreuve de VS. En cas de mauvaise tolérance, le niveau d'AI
est réajusté à la valeur précédente. La deuxième modalité possible consiste à
placer le patient en ventilation volumétrique assistée contrôlée et à réaliser
des essais de VS au moins une fois par jour en augmentant chaque fois le temps
de VS jusqu'à ce que le patient tolère 30 à 120 minutes consécutives de VS,
moment où il est extubé.
La plupart
des essais cliniques randomisés sur le sevrage concernent des populations
souffrant de pathologies hétérogènes. Des études spécifiques ont été réalisées
pour les catégories de malades suivantes : bronchopneumopathies chroniques
obstructives (BPCO), insuffisance cardiaque, insuffisance coronarienne,
maladies neuromusculaires, atteintes neurologiques centrales et patients
pédiatriques. Quelle que soit la maladie concernée, le déroulement de la
procédure de sevrage est identique et doit débuter le plus tôt possible [c, 2].
L'intérêt
de protocoles de sevrage a été également démontré chez ce type de patients [b].
L'existence d'une BPCO constitue un facteur de risque de sevrage difficile [b,
2] du fait d'un déséquilibre entre la charge imposée au système respiratoire et
la capacité des muscles respiratoires. Ce déséquilibre est largement dû à l'hyperinflation
dynamique. L'association à une insuffisance ventriculaire gauche constitue un
facteur aggravant. Les chances de succès du sevrage sont augmentées par
l'administration de bronchodilatateurs en cas de bronchospasme [c, 3]. Par
contre l'intérêt des corticoides systémiques en tant qu'aide au sevrage n'a pas
été évalué.
Il n'est
pas démontré que les critères pré-requis pour débuter une épreuve de VS sont
différents en cas de BPCO. Les critères utilisés dans les populations générales
de réanimation s'appliquent donc à ces patients [3]. Aucun indice prédictif de
succès ou d'échec de la procédure de sevrage n'a été spécifiquement validé dans
la BPCO.
L'épreuve
de VS peut indifféremment être effectuée en AI ou sur pièce en T [a, 1]. Les
critères de tolérance sont les mêmes que pour les populations générales de
réanimation à l'exception pour certains du seuil de SaO2 - mauvaise tolérance
si SaO2 < 88 % - [c, 3]. Le risque plus élevé de sevrage difficile peut
conduire à privilégier une épreuve de VS d'une durée de 120 min [c, 3].
En cas
d'échec de l'épreuve de VS, la VM est reprise rapidement en utilisant l'AI avec
PEP et en administrant des bronchodilatateurs en cas de bronchospasme, afin de
diminuer la charge respiratoire [b, 2]. L'ajustement des modalités de
ventilation repose en particulier sur la détection d'efforts inspiratoires
inefficaces par la clinique et l'analyse des courbes de pression et débit des
voies aériennes. Leur présence doit conduire à revoir le niveau de PEP à la
hausse et/ou d'AI à la baisse et éventuellement le cyclage [b, 2]. Certains
autres facteurs de risque de l'échec de l'épreuve de VS doivent être plus
spécifiquement recherchés : insuffisance ventriculaire gauche, ischémie
myocardique, anémie et neuromyopathie [c, 2].
La
ventilation non invasive (VNI) peut être proposée en cas d'échec de
l'extubation, afin d'éviter la ré-intubation [b, 2]. Dans ce cas, la
surveillance doit être particulièrement attentive afin de ne pas retarder
l'intubation, si elle doit avoir lieu. Cette approche nécessite un personnel
entraîné et en nombre suffisant au sein d'un centre expérimenté [3].
La VNI a
aussi été proposée après une extubation délibérée réalisée malgré l'échec de
l'épreuve de VS [a]. Cette approche est encore en cours d'évaluation, et ne
peut donc être recommandée actuellement [3].
Si la VNI
est utilisée après extubation, elle sera effectuée en AI par masque facial puis
dès que possible nasal. Les niveaux d'AI et de PEP ainsi que les durées de VNI
doivent être régulièrement réduits en vue du sevrage [3].
Les
patients atteints de BPCO en situation de sevrage difficile peuvent être pris
en charge de manière efficace dans des unités spécialisées hors réanimation [c,
2].
Le passage
en VS, en inversant le régime de pression intrathoracique, augmente le retour
veineux et la postcharge ventriculaire gauche. Il peut ainsi induire une
insuffisance cardiaque aiguë [b]. La stimulation catécholaminergique et
l'augmentation de la consommation d'oxygène peuvent être responsables d'une
ischémie myocardique chez les patients à risque [b].
Chez ces
patients, le pré-requis à l'épreuve de VS ne diffère pas du cas général (voir
la question 1) [3]. En cas de sevrage difficile, l'état cardiaque devra être
évalué par échocardiographie et/ou cathétérisme cardiaque droit et le
traitement à visée cardio-vasculaire adapté. L'amélioration des conditions de
charge ventriculaire par la réduction de la volémie (diurétiques) et des
résistances vasculaires (vasodilatateurs) est théoriquement préférable à la
stimulation de l'inotropisme, en raison de l'intense stimulation adrénergique
lors de la mise en VS et du caractère peu probable de la survenue d'un trouble
intrinsèque de la contractilité dans cette situation [c, 3].
Devant des
difficultés de sevrage d'origine cardiaque, il est logique d'envisager une
procédure de sevrage progressive permettant au système cardiovasculaire de
s'adapter à un nouvel état d'équilibre [3].
Les maladies
neurologiques pouvant conduire à la VM constituent un ensemble très hétérogène.
Les données de la littérature concernant le sevrage de ces malades sont
pauvres.
Dans les
pathologies cérébrales, le sevrage ne se conçoit qu'en l'absence d'hypertension
intracrânienne [2]. Les chances de succès de la procédure de sevrage augmentent
avec le score de Glasgow [b]. Les échecs d'extubation sont plus fréquents à
cause du risque d'encombrement - troubles de déglutition, toux inefficace -
[b]. L'évaluation clinique formalisée de ce risque est d'une importance
capitale (voir la question 2) [2]. Un risque majeur d'encombrement explique le
recours plus fréquent à la trachéotomie [b, 2].
Dans les
maladies neuromusculaires et les atteintes médullaires hautes, une évaluation
clinique régulière
est
nécessaire.
Dans les
maladies neuromusculaires en voie d'amélioration, comme la polyradiculonévrite
aiguë, les mesures répétées de la capacité vitale (> 8-10 mL/kg), de la
PImax (< -20 cm H2O), de la PEmax (> 40 cm H2O) peuvent aider à la
réussite du sevrage [c,3].
Une durée
d'au moins 12 heures a été proposée pour l'épreuve de VS (voir la question 3 :
durée de l'épreuve de VS). Durant celle-ci, l'hypercapnie (> 45 mm Hg) est
un signe de gravité majeure. Une baisse de la saturation artérielle en oxygène,
même modeste, témoigne d'une hypoventilation grave [2].
Une CV
minimale de 15 mL/kg a été proposée au cours de la polyradiculonévrite aiguë
pour envisager l'extubation, en l'absence de trouble de déglutition [c, 3].
Le sevrage
difficile pose la question du recours à la VNI ou à la trachéotomie qui seront
discutées au cas par cas [3].
Chez les
patients atteints de maladies neurologiques dégénératives, au décours de la
première décompensation respiratoire, il importe d'évoquer avec le patient et
sa famille les choix thérapeutiques futurs afin de faciliter les décisions
ultérieures.
Ils sont
assimilés à la population générale hormis l'existence en chirurgie thoracique
et abdominale, d'une dysfonction diaphragmatique postopératoire transitoire et
de la douleur, qui doit être traitée [b, 2]. Ces patients ont le taux d'échec
d'extubation le plus faible [b].
La
procédure de sevrage chez l'enfant ne doit pas être différente de celle
utilisée chez l'adulte [c, 2]. L'enfant est supposé être plus à risque de
développer une fatigue diaphragmatique, mais son rôle dans les échecs de
sevrage n'a jamais été démontré.
L'épreuve
de VS peut être faite indifféremment en AI ou avec une pièce en T, malgré les
résistances élevées des tubes trachéaux de petit diamètre [a,1]. L'incidence
des complications laryngées est plus importante en dépit d'une ventilation
habituellement à fuites [b]. Ces complications pourraient être prévenues par
l'administration de corticoïdes 6 à 12 heures avant l'extubation [b]. Les
différents indices prédictifs de l'échec de l'épreuve de VS ne sont pas plus
discriminants chez l'enfant que chez l'adulte [b].
L'échec du
sevrage de la ventilation est défini par la persistance d'une dépendance
ventilatoire partielle ou totale malgré des tentatives de sevrage répétées
depuis au moins 30 jours. Cette situation concerne des patients ventilés sur
sonde d'intubation ou de trachéotomie mais aussi ventilés de façon non invasive
[3].
La VNI
peut être proposée chez les patients en échec du sevrage de la ventilation
endotrachéale [b, 2]. Son intérêt dans cette situation n'a jamais fait l'objet
d'une évaluation prospective et randomisée. La VNI est contre-indiquée en cas
de troubles majeurs de la conscience ou de troubles de déglutition [b, 2]. Son
utilisation peut s'avérer impossible en cas de fuites importantes ou
d'intolérance du masque par le patient [c].
La
trachéotomie diminue le travail respiratoire [b], facilite la toilette
bronchique et améliore le confort du patient [d]. Son intérêt dans le sevrage
de la VM n'a jamais été démontré. En cas de contre-indication ou d'échec de la
VNI, la trachéotomie peut être proposée. Il n'existe pas de critère pour
définir le moment optimal de sa réalisation. Cette décision doit être prise au
cas par cas [3].
Les
patients en échec de sevrage (en référence à la définition retenue par le jury
: impossibilité d'interrompre la VM au delà de 30 jours après le début de la
procédure de sevrage) constituent un faible pourcentage des patients de
réanimation, de l'ordre de 5 %, mais posent un problème majeur de prise en
charge. Il s'agit le plus souvent de patients avec un coma chronique, une
insuffisance respiratoire chronique obstructive ou restrictive, les séquelles
d'une défaillance multiviscérale ou des complications postopératoires sévères.
Les
objectifs de la prise en charge en dehors de la réanimation sont la poursuite
de la procédure de sevrage et la mise en place de la réhabilitation [b, 2].
Celle-ci est constituée d'un entraînement à l'exercice, d'une assistance
nutritionnelle, d'une kinésithérapie et de l'éducation du malade. Ces patients
peuvent être accueillis dans des unités de soins intermédiaires respiratoires,
des unités de soins de suite spécialisées ou des unités de sevrage similaires
aux weaning centers nord-américains [2].
La prise
en charge à domicile de ces patients est très développée en France. Le retour à
domicile n'est envisageablequ'avec l'aide de professionnels entraînés [b, 2].
La prise en charge des patients avec une dépendance ventilatoire élevée -
supérieure à 16 heures par jour - nécessite une infrastructure particulière :
deux ventilateurs au domicile avec alarmes de haute et basse pression, batterie
de secours permettant plusieurs heures d'autonomie, humidificateur avec
réchauffeur, système d'aspiration trachéal avec batteries, source d'oxygène de
secours et ballon autogonflable (type Ambu®) en cas de ventilation sur
trachéotomie. Il doit être possible de contacter sur la totalité du nycthémère
un référent médical et un référent technique. Une telle prise en charge à
domicile fait peser des contraintes particulièrement lourdes sur la famille [b,
2].
Il
convient de se poser la question de la poursuite des soins au cours des
situations suivantes : lorsque le recours à la VNI ou à la trachéotomie
apparaît comme une obstination déraisonnable et lorsque la procédure de sevrage
et/ou la poursuite des soins sont refusées par le patient, sans toutefois
négliger le rôle de la famille [3].
Le jury
suggère la mise en place d'études prospectives randomisées sur les thèmes
suivants
Figure 1.
Déroulement de la procédure de sevrage. Elle comporte trois étapes : pré-requis
à l'épreuve de ventilation spontanée (VS), l'épreuve de VS et l'issue de
l'épreuve de VS (période de 48 h au terme de laquelle le sevrage est considéré
comme réussi ou non).
1) Le
médecin peut décider que l'un ou plusieurs des éléments du pré-requis peut
(peuvent) ne pas être présent(s). 2) Le choix entre les deux techniques et
celui de la durée de l'épreuve de VS dépend des habitudes de l'unité. 3)
L'extubation est une décision médicale sur prescription écrite. L'absence des
critères d'extubation ne conduit pas systématiquement à la refuser. 4) Le
sevrage difficile correspond à l'échec de l'épreuve de VS ou à la reprise de
l'assistance ventilatoire dans les 48 heures suivant son arrêt programmé. 5)
Réussi dès la première épreuve de VS, le sevrage est dit facile. 6) L'échec du
sevrage correspond à la persistance d'une ventilation partielle ou totale
malgré des tentatives de sevrage répétées depuis au moins 30 jours.